Le glyphosate est la matière active la plus utilisée dans le monde pour lutter contre les mauvaises herbes. Comment fonctionne-t-elle? En inactivant l’enzyme permettant la synthèse de trois acides aminés (tryptophane, phénylalanine et tyrosine). Ces acides aminés étant essentiels à la survie de la plante, la mort de la plante s’en suit.
Il serait aussi un antibiotique et une exposition chronique à un antibiotique favorise le développement de résistance à l’intérieur des populations bactériennes. Selon plusieurs sources, la prolifération des bactéries et des champignons pathogènes serait favorisée par la présence du glyphosate, tant dans les productions végétales que dans les élevages.
Omniprésence du glyphosate
Non, le glyphosate n’est pas le pire des pesticides sur le marché. Même si sa toxicité est toujours débattue, reste qu’il est, et de loin, le pesticide le plus utilisé en fréquence et en intensité. C’est qu’il est très efficace, flexible, et peu dispendieux. Plus de 800 000 tonnes seraient répandues chaque année dans le monde.
Le glyphosate et l’AMPA, un de ses sous-produits, sont abondamment détectés dans le sol et l’eau. Malheureusement la destruction des végétaux autour des champs affecte également la faune, en réduisant la nourriture et les habitats disponibles.
Rappelons entre autres la perte de 61 % des oiseaux des champs au Canada depuis 40 ans. Ils atteignent des organismes non ciblés et fragilisent la diversité des microorganismes constituant la base des écosystèmes. Pourquoi les microorganismes sont touchés? Parce que la voie métabolique synthétisant les acides aminés citée plus haut est aussi utilisée par les bactéries et les champignons, mais pas par les animaux.
Sans danger pour l’humain ?
Les humains peuvent être exposés au glyphosate lorsqu’ils appliquent l’herbicide ou via l’eau potable et les aliments contenant des résidus. L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) révélait en 2017 que sur 3188 échantillons, 30 % des aliments analysés contenaient des résidus 47 % des pois et lentilles, 37 % des céréales (rappelons ici que céréales et légumineuses sont desséchées avec le glyphosate avant leur récolte) dont près du tiers des aliments pour nourrissons et enfants, une population particulièrement vulnérable aux effets des substances chimiques.
On sait maintenant que 54 % des bactériennes intestinales de l’humain sont sensibles au glyphosate. Peut-on continuer de croire que la santé de l’humain n’est pas affectée par l’utilisation du glyphosate ?
Dans le futur, il est fort probable que la pratique d’une agriculture sans glyphosate devienne un enjeu important pour l’agroalimentaire. La planification et préparation de différents scénarios rendant l’agriculture sans glyphosate possible sont déjà en cours à l’échelle mondiale.
Selon la littérature disponible, quelques approches sont envisageables actuellement : cultures de couvertures, désherbage mécanique, pyrodésherbage, moment du semis, ou du traitement, paillis, etc. Mais disons-le, certaines utilisations actuelles du glyphosate sont moins à risque que d’autres et les approches proposées pourraient l’être de façon complémentaire à la pratique, tant au niveau de la réduction de l’utilisation du glyphosate que de la réduction du risque lié à l’impact de son utilisation.
Il serait souhaitable que les producteurs puissent avoir du soutien pour les aider à franchir cette étape via le Plan d’agriculture durable 2020-2030, qui cadre bien avec ce beau défi. Les futurs technologues de l’ITAQ sont d’ailleurs formés pour accompagner les producteurs tout au long de l’implantation de ces bonnes pratiques pour diminuer l’usage des pesticides sur nos cultures.
Notes bibliographiques
Beckie, H. J., Ken C. F. et Ashworth, M. A. (2020). Farming without Glyphosate?. Plants, 9(1), 96. https://doi.org/10.3390/plants9010096
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Robin, M.-M. (2018). Le Roundup face à ses juges. Les Éditions Écosociété.
Seneff, S. (2021). Toxic Legacy: how the weed killer glyphosate is destroying our health and the environment. Chelsea Green Publishing.
*Cet article est paru dans La Terre de chez nous du 2 octobre 2024
Anik Larochelle
Agronome et enseignante en phytoprotection, ITAQ campus de Saint-Hyacinthe